Coopération

Ne pas réduire l'Afrique au Zimbabwe

A deux semaines du sommet Europe-Afrique auquel participera le président du Togo, Faure Gnassingbé, la présidence portugaise de l'UE veut éviter que la présence contestée du Zimbabwéen Robert Mugabe à Lisbonne n'éclipse les enjeux d'une rencontre jugée cruciale pour relancer un véritable partenariat entre les deux continents.

"Ce que nous aimerions, c'est que le sommet entre l'UE et l'Afrique, un sommet historique très important, se concentre sur les documents qui vont être approuvés et pas sur le président Robert Mugabe", déclarait jeudi le Premier ministre portugais José Socrates, président en exercice de l'Union européenne."Il s'agit d'un sommet qui ne s'est pas tenu depuis sept ans, d'un sommet sur les droits de l'Homme, sur les changements climatiques, sur les migrations, sur les problèmes de l'UE et de l'Union africaine, a-t-il souligné. J'aimerais que ce sommet ne soit pas seulement sur un pays ou sur un dirigeant".

La veille, le ministre portugais des Affaires étrangères Luis Amado avait jugé "préférable" que Mugabe ne vienne pas, estimant que sa présence "détournerait de l'essentiel".

Une déclaration accueillie avec étonnement dans les chancelleries européennes et parfois ironie en Afrique, alors que l'invitation de M. Mugabe, imposée par ses pairs africains, a fait l'objet d'une longue bataille diplomatique menée côté européen par M. Amado.

"Il n'est pas possible d'inviter quelqu'un (l'Union africaine dans son ensemble, ndlr) et de lui demander de laisser son bras ou son doigt à la maison", a réagi Mario Feliz, directeur Afrique du ministère angolais des Relations extérieures, cité par l'agence Lusa.

"Dans cette histoire, les Portugais jouent double jeu, a affirmé pour sa part un diplomate européen. Ils veulent leur sommet, ils l'auront mais il va falloir voir qui vient, et à quel niveau!"

Depuis une première édition au Caire en 2000, déjà sous présidence portugaise de l'UE, aucun sommet n'a pu réunir les chefs d'Etat des deux continents, plusieurs pays, et tout particulièrement le Royaume-Uni, refusant la présence de M. Mugabe accusé de violations des droits de l'homme.

Et l'annulation en février 2003 du deuxième sommet UE-Afrique, à deux mois de la date prévue à Lisbonne, reste "le cauchemar de beaucoup de diplomates portugais", confiait récemment un haut-fonctionnaire à Lisbonne.

Même si, à ce jour, seul le Royaume-Uni a officiellement menacé de boycotter le sommet, plusieurs autres capitales européennes ont conditionné l'invitation de Mugabe à l'organisation d'un débat sur le Zimbabwe.

Un débat que Lisbonne a fini par accepter sous la pression de ses partenaires, mais que les Portugais rechignent à mettre en avant et n'ont d'ailleurs toujours pas officiellement annoncé.

Pour le chef de la diplomatie portugaise, "on donne beaucoup trop d'importance à cette question de la participation de Mugabe". "Ca tourne à l'obsession!", s'est exclamé vendredi M. Amado, alors qu'il recevait son homologue sénégalais Cheikh Tidiane Gadio.

"Nous sommes 53 pays en Afrique. Pourquoi réduire l'Afrique au Zimbabwe", a abondé M. Gadio, venu remercier le Portugal pour avoir, "en tendant la main à l'Afrique et à l'Europe", créé "l'opportunité de discuter de questions de fond".

Le ministre sénégalais a notamment cité le problème des migrations, auquel l'Europe et l'Afrique doivent trouver "une solution conjointe", ainsi que les besoins en investissements dans les infrastructures et l'énergie. Des secteurs dans lesquels les entreprises européennes sont confrontées à une concurrence toujours plus grande de la part de la Chine, mais également d'autres pays émergents comme le Brésil ou l'Inde.

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