Diplomatie

Bon anniversaire !

Première ex-colonie d'Afrique noire à accéder à l'indépendance il y a cinquante ans, le Ghana, qui célèbre cet anniversaire le 6 mars, est aujourd'hui unanimement salué comme un modèle de stabilité et pourtant, selon plusieurs analystes, de nombreux espoirs ont été déçus. "Certes, nous n'avons pas sombré dans la guerre civile comme la Côte d'Ivoire ou le Nigeria, mais nous avons eu pas mal de coups d'Etats et, malgré tout, on nous regarde comme un point brillant sur la carte de l'Afrique", s'étonne Sebastian Spio-Garbrah, analyste d'Eurasia group, basé à New York.

Tous ceux qui sont assez vieux pour se rappeler de l'époque coloniale attribuent la relative stabilité au système du... pensionnat à l'école qui a contraint les différents groupes ethniques à vivre ensemble."Quand les gamins quittaient l'école ils ne se reconnaissaient pas en tant qu'Ashanti ou Ewe, mais comme copains", explique Kwame Jantuah, ancien ministre et l'un des membres fondateur du parti de Kwame NKrumah, premier président du Ghana indépendant, l'ex-Gold Coast britannique.

"Nkrumah a fait beaucoup pour cimenter le pays, par exemple en interdisant les partis politiques fondés sur la religion ou la région", confirme Kwaku Baprui Asante, autre ancien ministre de Nkrumah.

Le renversement de ce dernier en 1966 allait donner le signal d'une série de coups d'Etat, dont le dernier, en 1981, a porté au pouvoir pour près de 19 ans un officier de l'armée de l'air, Jerry Rawlings.

Elu démocratiquement en 1992, réélu en 1996, Rawlings n'a pas succombé à la tentation de modifier la constitution pour rester au pouvoir et a laissé en 2000 la place à John Kufuor, actuellement dans son second mandat.

Ce solide ancrage démocratique met désormais le pays à l'abri des bruits de bottes. "Le Ghana fait maintenant partie des pays où la démocratie est là pour durer. Rawlings ne tentera pas un putsch et l'actuel président ne va pas chercher à tripatouiller la constitution", juge un diplomate.

Les avis sont plus mitigés sur au bilan socio-économique de 50 ans d'indépendance.

Le gouvernement met en avant de gros progrès en matière de santé et d'éducation, mais K.S.P Jantuah conteste cette vision: "au moment de l'indépendance, un enfant de famille pauvre avait plus de chances qu'aujourd'hui d'aller dans une bonne école", dit-il à l'AFP.

"Même chose pour la santé: de notre temps il y avait des médecins itinérants qui sillonnaient le pays. Aujourd'hui les pauvres doivent parfois faire 30 ou 40 km pour recevoir des soins", selon lui.

Selon l'indice de développement de l'ONU, le Ghana, où l'eau et l'électricité se font rares, est actuellement 136ème sur 177 pays.

Et pourtant le pays est deuxième producteur mondial de cacao, produit de l'or, du bois, de la bauxite et des diamants.

"La situation s'est passablement détériorée depuis l'indépendance", commente le même diplomate étranger.

Le pays transforme sur place un peu de cacao et de bois, mais dépend largement des importations pour les biens manufacturés, alors que du temps de Nkrumah, il existait des raffineries de sucre, des usines de pneus, et des conserveries de tomates et de viande, aujourd'hui disparues ou en ruines.

Pour un diplomate étranger, le Ghanéen moyen n'a vraiment pas de quoi sauter de joie pour ce 50ème anniversaire: "A part les Black Stars (l'équipe nationale de football) et Kofi Annan" il n'y a rien, dit-il crûment.

Le Ghana depuis l'indépendance

Voici les dates du Ghana depuis l'indépendance en 1957

- 6 mars 1957: La Gold Coast (Côte de l'Or) accède à l'indépendance au sein du Commonwealth, après plus de 80 ans de colonisation britannique. Le pays prend le nom de Ghana sous l'autorité de Kwame Nkrumah, Premier ministre depuis 1952.

- déc 1958: Une Conférence panafricaine décide de soutenir les mouvements d'indépendance en Afrique.

- 1er juil 1960: Le Ghana devient une République sous la présidence de Nkrumah, qui s'attribue le titre de Osagyefo (le Rédempteur) et prône un "socialisme africain".

De 1961 à 1964, Nkrumah échappe à plusieurs attentats, après avoir imposé de sévères mesures d'austérité, s'être livré à une politique de répression et avoir fait taire toute opposition, son Parti de la convention du peuple devenant parti unique.

- 24 fév 1966: Nkrumah, en visite à Pékin, est renversé lors d'un coup d'Etat dirigé par le général Ankrah.

- 13 jan 1972: Coup d'Etat du lieutenant-colonel Ignatius Acheampong.

- 4 juin 1979: Le capitaine Jerry Rawlings renverse le général Akuffo, au pouvoir depuis 1978. Il mène une politique de "nettoyage", avec l'exécution de plusieurs généraux, dont trois anciens présidents, avant de céder la place en septembre à un président démocratiquement élu, Hilla Limann.

- 31 déc 1981: Rawlings reprend le pouvoir à la faveur d'un nouveau coup d'Etat et crée un Conseil national provisoire de défense (PNDC).

En 1982, le Ghana est le premier pays d'Afrique à mettre en oeuvre un plan d'ajustement structurel. Les répercussions sociales susciteront des critiques à l'intérieur.

- 3 nov 1992: Rawlings est confirmé dans ses fonctions lors de la première présidentielle démocratique en treize ans, quelques mois après le multipartisme. L'opposition conteste les résultats, puis boycotte les législatives fin décembre.

- 7 jan 1993: Proclamation de la IVème République après onze ans de régime militaire.

- février-mars 1994: Afrontements interethniques dans le nord: quelque 2.000 morts et 150.000 déplacés. 200 villages incendiés et état d'urgence instauré.

- 1er nov 1996: Amendement de la Constitution allant dans le sens d'un renforcement des pouvoirs du chef de l'Etat.

- 7 déc: Victoire de Rawlings et de son parti, le Congrès national démocratique (NDC), aux élections générales, jugées équitables.

- 7 et 28 déc 2000: John Kufuor, de la principale formation d'opposition, le Nouveau parti patriotique (NPP), est élu au second tour de la présidentielle (56,73%) face à John Atta Mills, "dauphin" désigné de Rawlings, qui ne pouvait briguer un troisième mandat.

- 7 jan 2001: John Kufuor prête serment, refermant la page sur 19 années de pouvoir de Rawlings.

- 6 mai 2002: Inauguration d'une Commission nationale de réconciliation (NRC), inspirée de la Commission vérité en Afrique du Sud, pour enquêter sur les violations des droits de l'Homme sous les régimes militaires.

- 6 nov 2004: Des militaires - d'active comme du cadre de réserve - ont été arrêtés avant une "tentative de coup d'Etat pour renverser" Kufuor (source proche de la présidence).

- 7 déc: Elections générales, marquées par une participation record et peu d'irrégularités. M. Kufuor est réélu dès le premier tour de la présidentielle (52,75%) et le NPP obtient la majorité absolue.

- 13 juin 2005: Le président américain George W. Bush montre en exemple de développement et de démocratie cinq pays africains, dont le Ghana, en invitant leurs dirigeants à la Maison Blanche.

- 6 oct: Le président français Jacques Chirac reçoit M. Kufuor.

- 26 oct 2006: Rawlings dément des accusations de préparer un coup d'Etat portées contre lui par le président Kufuor.

- 29 jan 2007: Le Ghana choisi pour présider l'Union africaine (UA) en 2007.

Le Ghana en bref

Le Ghana, dirigé par John Kufuor depuis janvier 2001, est régulièrement cité par la communauté internationale comme un modèle en Afrique pour ses progrès en matière d'économie et de démocratie.

- SITUATION GEOGRAPHIQUE:

Pays de l'Afrique de l'ouest de 238.537 km2 sur l'océan Atlantique. Limitrophe du Togo à l'est, du Burkina au nord et de la Côte d'Ivoire à l'ouest.

- POPULATION: 22,1 millions d'habitants en 2005 (Banque mondiale). Principales ethnies: Akans - dont Ashantis - (44%), Dagombas, Mamprusis (16%), Ewés (13%).

- CAPITALE: Accra.

- LANGUES: Anglais (officielle), locales.

- RELIGIONS: Chrétiens (60%), musulmans (10%), animistes.

- HISTORIQUE/REGIME:

Ancienne colonie britannique. En 1957, la Gold Coast (Côte de l'Or) devient indépendante, sous le nom de Ghana, dans le cadre du Commonwealth. La République est proclamée en 1960 avec Kwame Nkrumah comme premier président. Il est destitué lors d'un coup d'Etat en 1966.

En décembre 1981, le capitaine Jerry Rawlings - qui avait déjà dirigé un coup d'Etat en 1979 avant de remettre le pouvoir au civil Hilla Liman - prend le pouvoir à l'issue d'un second coup de force.

Après l'adoption d'une nouvelle Constitution instituant le multipartisme, M. Rawlings est élu fin 1992 lors d'un scrutin démocratique. En 1993, la proclamation de la IVème République met un terme à onze années de régime militaire. Jerry Rawlings est réélu lors des élections générales de décembre 1996 pour un dernier mandat de quatre ans.

Fin 2000, John Kufuor est élu au deuxième tour de la présidentielle, avec 56,73% des suffrages face à John Atta Mills, vice-président sortant et "dauphin" désigné de Rawlings, qui ne pouvait briguer un troisième mandat. Sa prestation de serment, en janvier 2001, a marqué la première transition d'un président démocratiquement élu à un autre depuis l'indépendance.

En décembre 2004, M. Kufuor a été réélu dès le premier tour de la présidentielle (52,75%) et sa formation, le Nouveau parti patriotique (NPP), a obtenu la majorité absolue. Il a prêté serment pour un second mandat de quatre ans en janvier 2005.

- ECONOMIE:

L'or et le cacao --deuxième producteur mondial après la Côte d'Ivoire-- sont les deux principaux produits d'exportation. Café, bois, diamants, bauxite, manganèse.

+ PNB: 450 dollars par habitant en 2005 (Banque mondiale).

+ DETTE EXTERIEURE: Le Ghana fait partie des 18 pays les plus pauvres qui ont bénéficié de l'annulation de leur dette par le G8 en juin 2005.

- FORCES ARMEES:

7.000 hommes, selon l'Institut international des études stratégiques (IISS, 2006).

Le Ghana a joué un rôle important dans des médiations pour résoudre le conflit au Liberia et la crise politico-militaire en Côte d'Ivoire et participe à des activités de maintien de la paix des Nations unies.

Il a été choisi pour présider l'Union africaine (UA) en 2007.

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