Diplomatie

Le Togo et l’avenir de la Francophonie

Le 13e Sommet des Chefs d’Etat et de gouvernement s’est achevé le 24 octobre dernier à Montreux.

Réunis au bord du Lac Léman pendant deux jours, les ultimes décideurs de la Francophonie que sont nos Chefs d’Etat ont entériné l’ensemble des documents préparés trois jours auparavant par le Conseil Permanent de la Francophonie et la Conférence des Ministres des Affaires Etrangères en charge localement de l’action francophone. Le Chef de l’Etat togolais, Son Excellence Faure Essozimna Gnassingbé, Rapporteur Général du Sommet, pris par l’actualité malheureuse des catastrophes naturelles qui frappent notre pays, s’est fait représenter par le Ministre d’Etat Solitoki Esso, lequel a présenté le rapport général sanctionnant les travaux.

Il va de soi que comme tout sommet de haut niveau, celui de la Francophonie ressemble de l’extérieur à une grande messe. Mais vu de l’intérieur, ce qui s’y déroule ressemble plus à une bataille de négociations, où chaque pays défend bec et ongles ses prérogatives, tout en mettant en branle l’essence même du vivre ensemble francophone, à savoir les solidarités bilatérales et multilatérales.

Ainsi peut-on comprendre que ce n’est pas pur hasard si le Bénin, le Togo et le Vietnam, juste quelques une heures avant la clôture des travaux par la Présidente de la Confédération suisse, ont ramené à l’ordre du jour la question des catastrophes naturelles récurrentes, pour arracher à l’assemblée l’adoption d’une résolution qui va au-delà de la simple compassion pour les victimes, en appelant clairement « la communauté internationale à se mobiliser pour que les populations touchées retrouvent le plus rapidement possible les conditions de vie décentes et sûres ».

C’est à ce niveau de concret que se joue aussi l’avenir et la crédibilité de l’OIF par rapport à ses pays membres, au regard de cette critique pérenne adressée à une institution que certains jugent parfois empêtrée dans des préoccupations théoriques et « globales » (à tort parfois, sans connaître les textes qui régissent les missions de l’Organisation !).

Le Togo est un pays fidèle à la Francophonie, depuis ses origines, et il était important qu’il rappelle à ses partenaires non seulement ses efforts en matière de démocratie et des droits de l’homme, mais aussi ses difficultés devant les aléas de la nature et les effets désastreux du changement climatique.

En diplomatie, aimait à dire un ancien ministre des Affaires Etrangères du Togo, « la résolution c’est le moyen d’aller chercher le nerf de la guerre ». Et celle-là, la neuvième sur « les inondations récurrentes frappant de nombreux pays francophones » qui a mis autour de la même table les diplomates togolais et béninois est, assurément, preuve de la reconnaissance que nos voix doivent être concertées dans la défense des intérêts de nos pays au sein de la Francophonie.

Un dernier mot sur le choix du Chef de l’Etat, son Excellence Faure Essozimna Gnassingbé comme Rapporteur Général du 13e Sommet. La question de la bonne gouvernance, de la démocratie étant désormais une bataille pour la Francophonie depuis la Déclaration de Bamako, les efforts accomplis par le Togo en ce sens depuis une dizaine d’années avaient besoin d’être salués par l’ensemble des partenaires francophones. Tel a été l’argument principal du Secrétaire Général de la Francophonie, son Excellence le Président Abdou Diouf, quand il a proposé à l’ensemble des Chefs d’Etat le nom de son homologue togolais.

Au moment où Madagascar, la Guinée, la Côte d’Ivoire ou le Niger se démènent pour sortir de leurs crises, le Togo (sanctionné durement par l’OIF dans un passé récent) a pris le chemin obstiné de l’apaisement politique. Dans son éditorial publié à la veille du Sommet dans La Tribune de Genève, le Président de la République rappelait le chemin parcouru par le Togo. Les mots de cette adresse, empreints de sagesse et conscients des difficultés de la construction démocratique, disent néanmoins clairement l’objectif qui devrait être celui des pays africains longtemps piégés par la facilité de l’illusion politique.

« Je me réjouis que la tolérance et l’acceptation mutuelle soient ainsi devenues les principes qui sous-tendent notre volonté commune de bâtir, dans la diversité, un Togo tourné vers la modernité. Le climat politique apaisé est désormais notre atout majeur. Nous travaillons chaque jour à le consolider afin qu’il nous permette d’envisager avec plus de confiance et de détermination, les chantiers du développement ainsi que notre aventure commune au sein de la grande famille francophone. »

Consolider. Dialoguer. Développer. La trilogie devient presque unitaire si l’on est conscient de ce qui nous guette dans notre cécité et nos radicalismes bon enfant : la régression permanente dans les limbes de la géopolitique internationale ! Et notre existence au sein de la cette communauté francophone exigeante désormais vis-à-vis de ses membres est une chance à saisir pour construire un Togo débarrassé des faux-fuyants, un Togo moins mélancolique démocratiquement, qui fasse la fierté des Francophones du monde entier.

Kangni ALEMDJRODO
Ecrivain, Conseiller à la Culture et à la Francophonie
Représentant personnel du Chef de l’Etat au Conseil Permanent de la Francophonie

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