Eco & Finance

Le temps est venu d’agir de manière concertée

«Comment mobiliser un financement adéquat afin de soutenir les producteurs pour les prochaines campagnes agricoles? Comment  investir (…) pour faire face à la résilience des populations les plus vulnérables ? », s’est demandé le Premier ministre togolais, Gilbert Houngbo, à l’ouverture mardi à Lomé d’une réunion de haut niveau sur la crise alimentaire dans les pays de la Cédéao.

«Le temps est venu d’agir de manière concertée, en s’attaquant aux causes profondes et multiples de l’insécurité alimentaire», a souligné M. Houngbo.

La réunion de Lomé, organisée conjointement par la Cédéao, l’UEMOA et le CILSS (Comité permanent inter-Etats de lutte contre la sécheresse au Sahel), a pour objectif de dégager des pistes et, si possible, une stratégie commune. Car la situation est particulièrement inquiétante.

De nombreux pays sont en situation déficitaire en raison d’une mauvaise récolte l’année passée. Mauritanie, Gambie, Tchad, Niger ou encore Sénégal ont accusé une baisse significative de leur production céréalière.

Plus de 7 millions de personnes sont en manque chronique de vivres dans la région Sahel, estime Thomas Yanga, le directeur régional du Programme alimentaire mondial (PAM).

L’urgence est donc là.

En photo : Gilbert Houngbo et les ministres de l’Agriculture des pays membres de la Cédéao ce matin à Lomé

Voici l’intervention du Premier ministre togolais, Gilbert Houngbo

Je voudrais, avant toute chose, au nom du Chef de l’Etat, m’acquitter d’un devoir citoyen, celui de souhaiter à tous les experts et délégations venus des pays amis et frères, la cordiale et chaleureuse bienvenue à Lomé. Je voudrais également exprimer la gratitude du peuple togolais aux initiateurs de la présente réunion pour avoir choisi le Togo pour la tenue de cette importante rencontre sous régionale.

Mesdames et Messieurs,

Comme vous le savez, nos économies sont fortement tributaires du secteur agricole qui mobilise près de 60% de la population active et représente, à lui seul,  environ 40% du PNB régional. Malgré cette importance et en dépit de sa forte contribution à la sécurité alimentaire, à la création de la richesse globale, à la fourniture d’emplois et de revenus, le secteur agricole bénéficie difficilement de 10% du budget d’investissement des pays de la région.

La présente rencontre qui nous réunit ici, vient à point nommé, si l’on se réfère aux derniers chiffres alarmants publiés par la CEDEAO et le CILSS sur l’insécurité alimentaire. Les productions céréalières du Sahel et d’Afrique de l’Ouest sont, en effet, en baisse de 9% par rapport à la campagne agricole 2010/2011, année de production record. En outre, près de 6 millions de personnes étaient en insécurité alimentaire sévère en mars 2012 ; une situation qui pourrait s’aggraver en raison des circonstances particulières sévissant au Mali, circonstances ayant entraîné des milliers de déplacés. Les prix des denrées alimentaires restent à un niveau élevé et les échanges de produits agricoles sont entravés par la multiplication des contrôles frontaliers et les nombreuses tracasseries routières. La situation nutritionnelle demeure également préoccupante avec des taux de malnutrition au-dessus du seuil d’alerte qui est de 10%. En un mot, la situation est grave et préoccupante.

Mesdames et Messieurs,

Peu intégrée dans les politiques de nos pays et surtout dans le financement apporté par les budgets nationaux et par les instances internationales, la production agricole est revenue au devant de la scène internationale comme un réel secteur de développement à l’échelle nationale, régionale et mondiale. Elle est aussi la clé pour asseoir une solide croissance dans nos pays et faire ainsi reculer la pauvreté.

La réunion restreinte d’avril 2012 du Réseau de prévention des crises alimentaires, en tirant la sonnette d’alarme, a proposé des pistes que la présente rencontre peut explorer afin de permettre aux Chefs d’Etats des pays membres de la CEDEAO et du CILSS une réelle prise en compte de la situation et des actions concrètes et urgentes pour éviter le pire.

Quelles mesures prendre pour améliorer durablement la production agricole? Comment mobiliser un financement adéquat afin de soutenir les producteurs pour les prochaines campagnes agricoles? Comment  investir dans les interventions à long terme pour faire face à la résilience des populations les plus vulnérables? Autant de questions qui nous interpellent et auxquelles il nous faut trouver des réponses idoines.

Mesdames et Messieurs,

Au Togo, le secteur agricole occupe les 2/3 de la population active, et a représenté durant ces dix dernières années, 40% du PIB et plus de 20% des recettes d’exportation. Mais, à l’instar de leurs concitoyens de la région, le taux de pauvreté en milieu rural demeure encore trop élevé.

C’est pour remédier à cette situation, et s’inspirant de la politique régionale agricole de la CEDEAO que le Togo a élaboré et adopté depuis 2008, une Stratégie de Relance de la Production Agricole, puis en 2010 son Programme National d’Investissement et de Sécurité Alimentaire (PNIASA) en vue de relancer la croissance socio-économique du pays et lutter plus efficacement contre la pauvreté et l'insécurité alimentaire. Les premiers effets positifs de notre lutte pour le secteur agricole commencent à se faire sentir avec une production globalement excédentaire depuis trois (03) ans.

Mesdames et Messieurs,

Le temps est venu d’agir de manière concertée, en s’attaquant aux causes profondes et multiples de l’insécurité alimentaire par l’adoption de solutions politiques, économiques, financières et techniques durables. Il s’agira d’examiner ensemble les opportunités et les choix stratégiques afin d’assurer la cohérence et l’efficacité à long terme des mesures prises pour faire face à la gravité et à l’urgence de la situation de la sécurité alimentaire dans le monde, et plus particulièrement, dans notre sous-région. La mobilisation de tous les acteurs est d’une importance capitale pour nous permettre de relever les défis dans notre marche résolue vers un développement économique durable s’appuyant sur l’agriculture.

Les perspectives alimentaires inquiétantes interpellent tous les acteurs. Nous devons mettre au centre de nos préoccupations, la résolution conséquente de la question de la sécurité alimentaire, car un peuple affamé ne peut être mobilisé pour les chantiers du développement.

Mesdames et Messieurs,

Même si le chemin est encore long pour enrayer la faim et la pauvreté dans le monde, nous pouvons néanmoins nous féliciter de la prise de conscience  collective qui favorise les grandes rencontres, à l’instar de celle qui nous réunit ici et qui nous permet d’actualiser nos réflexions et prendre des engagements vis-à-vis de l’insécurité alimentaire. Car, pour être plus efficaces, il nous faut anticiper les situations pour éviter de toujours jouer au pompier ; il nous faut pour cela assurer à tout moment une alimentation suffisante à nos populations et libérer les ménages vulnérables des affres de la faim.

Il est urgent que la présente réunion de haut niveau puisse clairement définir les axes qui permettront une meilleure coordination des actions au niveau de la CEDEAO contre le fléau, faciliter les échanges entre les pays excédentaires et les pays déficitaires et surtout dynamiser la mobilisation les ressources  au niveau régional et international au profit des pays touchés par la crise alimentaire.

Je réaffirme d’ores et déjà la disponibilité et l’engagement du Togo à prendre une part active dans le processus dont l’aboutissement est l’élimination de la faim dans l’espace CEDEAO.

Je reste convaincu de l’efficacité des mesures conjoncturelles et structurelles que vous proposerez aux Chefs d’Etats et je déclare ouverte la réunion de haut niveau sur la situation alimentaire et nutritionnelle dans les Etats membres de la CEDEAO et du CILSS.

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