Société

Imprévisible Mono

Coupés du reste du monde depuis la mi-septembre et la crue du fleuve Mono, qui a en partie détruit leur village, les habitants d'Avévé ont poussé un ouf de soulagement vendredi en voyant descendre du ciel deux hélicoptères français chargés de vivres. Au bord du terrain de football, transformé en piste d'atterrissage, l'un des chefs de ce village de 2.000 âmes, Agbonon Adadévi, observe avec satisfaction les Puma de la Force française Licorne déposer tour à tour leurs chargements de 800 kg d'aide tractés dans les airs au bout d'un filin.

"Cela fait deux semaines qu'on était coupé du reste du pays. Les gens avaient le sentiment d'être abandonné", explique le vieil homme en haut de pyjama vert, short noir et sandales de plastique.Autour de lui s'agite une foule bigarrée, pleine d'enfants, qui observe le ballet des hélicoptères avec un mélange de curiosité et de soulagement.

"Cela fait près de 15 ans qu'on n'avait pas vu ça: les eaux ont détruit au moins une trentaine de maisons", ajoute Agbonon, qui est "très content de cette aide", même si, dit-il, "c'est un peu petit, vu les besoins".

A quelques dizaines de mètres de là, une partie du village baigne encore dans les eaux boueuses, caprices du fleuve voisin qui a quitté son lit après les pluies diluviennes de la mi-septembre plus au nord.

"C'est comme ça que le Mono fonctionne. Il sort tout d'un coup, et en deux jours tout est inondé", explique Lucien Messan, un habitant.

A mesure que l'on s'éloigne de l'allée centrale du village, le dédale des ruelles se fait boue, puis marécage. Si l'eau a baissé ces derniers jours, elle occupe encore une partie des jardins et maisons qu'elle a parfois dévastées.

D'une baraque il ne reste plus que le toit de tôle effondré. "Les habitants ont pu sortir juste à temps avant qu'elle ne s'écroule," raconte Lucien. D'autres sont éventrées, envahies par la boue, parfois encore noyées par plusieurs dizaines de centimètres d'eaux brunâtres.

Quant aux cultures (maïs, manioc, légumes) qui nourrissaient le village avec la chasse et la pêche, "il n'en reste plus rien", soupire Lucien. "Et comme les routes étaient coupées, on n'avait plus de quoi vivre".

Si les inondations n'ont fait aucune victime à Avévé, alors que plusieurs personnes ont été emportées par les eaux dans les villages voisins selon des habitants, ces derniers craignent désormais les épidémies.

"On n'a plus d'eau potable, car les puits ont été inondés. Il y a des fièvres, et le palu qui s'amplifie", note Aziagblé Adakou, une femme de 35 ans, enroulée dans un boubou multicolore d'où émerge sa petite nièce Akouélé, 2 ans.

Au total, 2,5 tonnes de maïs, 1,3 tonne de riz, 225 kg de haricots, 368 kg d'huile, 8 cartons de savon, 18 kg d'insecticide, plus de 10 kg d'allumettes et plusieurs dizaines de couvertures, fournis par les autorités togolaises ont été apportés à Avévé vendredi et samedi par les soldats français, sollicités par le Togo pour convoyer de l'aide à 40.000 sinistrées de l'Est.

"Cela rentre dans le cadre de nos missions humanitaires", explique le chef de la mission française, le commandant Bernard Vettori, dont le régiment, basé à Etain (Meuse - est de la France), était intervenu en Asie au moment du tsunami de 2004.

Les soldats français, qui avaient effectué une mission similaire dans le nord-ouest du Togo en septembre, doivent rentrer en début de semaine prochaine à leur base d'Abidjan, où la Force Licorne ne compte plus que 2.400 soldats, contre plus de 5.000 au plus fort de la crise ivoirienne.

Sur instruction personnelle du président Faure Gnassingbé, le gouvernement a débloqué il y a quelques semaines d'importants moyens financiers pour venir en aide aux sinistrés.

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