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Attention, la Turquie débarque en Afrique

Le ministre togolais des Affaires étrangères, Elliott Ohin, participe à Istanbul à la conférence ministérielle de partenariat Afrique-Turquie où il est question de développer la coopération politique et économique.

Déçu par les atermoiements de l’Union européenne, qui repousse sans cesse son adhésion, Ankara réoriente sa diplomatie vers l’Afrique. En outre, l’atonie des marchés occidentaux incite les entreprises turques à travailler au sud du Sahara. En dix ans, les échanges commerciaux ont triplé, tandis que s’intensifiaient les liens avec les capitales du continent noir.

C’est donc vers l’Afrique que les entrepreneurs turcs tournent désormais leurs regards.

Les relations diplomatiques et commerciales de la Turquie avec le continent se sont métamorphosées : en l’espace d’une décennie, Ankara a triplé le nombre de ses ambassades et en compte dorénavant vingt-cinq — autant que l’Inde —, dont quinze ont été inaugurées entre 2009 et 2010. 

Disposant du statut d’observateur au sein de l’Union africaine, le pays participe à cinq missions de maintien de la paix en Afrique tandis qu’une douzaine de ses frégates patrouillent au large des côtes somaliennes dans le cadre de la flottille internationale de lutte contre la piraterie. 

LIOT

Elliott Ohin, le chef de la diplomatie togolaise

Sur le versant économique, Ankara compte parmi les membres non régionaux de la Banque africaine de développement (BAD)  et envisagerait d’établir d’ici 2019 une zone de libre-échange avec la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC), une union douanière entre le Kenya, l’Ouganda, la Tanzanie, le Burundi et le Rwanda.

Alors que Turkish Airlines, vingt-quatrième compagnie aérienne du monde, dessert désormais quatorze villes et douze pays du continent, le volume des échanges commerciaux entre la Turquie et l’Afrique subsaharienne — l’Afrique du Sud et le Nigeria en premier lieu — aurait atteint près de 20 milliards de dollars en 2009, soit plus du triple de son niveau de 2003. Les exportations vers le sud du Sahara (10,2 milliards de dollars en 2009) représenteraient plus de 10 % du total réalisé par la Turquie.

De 20 à 30 % moins coûteux que les produits européens, le made in Turkey (matériaux de construction, agroalimentaire, ingénierie, machinerie, textile, prêt-à-porter, équipement médical, technologies de l’information, produits d’hygiène personnelle et de nettoyage, ou encore bijouterie) jouit auprès du consommateur africain d’une meilleure réputation que son concurrent chinois.

Au Togo, un premier partenariat a été noué il y a quelques semaines. Le géant turc de l’engrais, Güneysan, s’est associé à un importateur local pour développer des activités dans le domaine agricole dans les pays de la région.

Voici l’intervention d’Elliott Ohin, le ministre des Affaires étrangères togolais lors de la conférence ministérielle de partenariat Afrique-Turquie

Mon pays, le Togo, est honoré de prendre la parole devant cette auguste assemblée qui réunit la grande Turquie et l’Afrique entière en vue de jeter les bases d’une nouvelle ère de coopération, mutuellement bénéfique pour les peuples turc et africain. 

Qu’il me soit permis d’exprimer nos sincères remerciements à Son Excellence Monsieur Abdullah GÜL, Président de la République de Turquie, au Gouvernement et au peuple turc pour l’accueil qui a été réservé à moi-même ainsi qu’à la délégation qui m’accompagne.

Mesdames et Messieurs les Ministres, 

Mesdames et Messieurs,

Le processus de globalisation et l’évolution des technologies ont créé un contexte nouveau dans les échanges économiques et commerciaux.

La nouvelle société de l’information et de la communication et le développement des outils de diffusion des connaissances qui rapprochent notre continent de la Turquie offrent des possibilités considérables qui contribuent aujourd’hui à bâtir une société plus ouverte et plus compétitive. 

Mais force est de constater que l’Afrique, notre continent, est loin de tirer les fruits de ces opportunités.

Aujourd’hui encore, elle doit davantage faire face à de nouveaux défis que constituent, entre autres, les crises alimentaire, énergétique et les changements climatiques. 

Tous les rapports sont formels pour dire que le niveau de réalisation des objectifs du millénaire pour le développement est largement en-deçà des attentes.

Mesdames et Messieurs les Ministres

Mesdames et Messieurs,

L’Afrique n'est pas pauvre en termes de facteurs de développement. Notre handicap, dans le passé résidait en partie dans le manque de mise en œuvre de politiques appropriées. Le développement peut avoir lieu si des politiques bien conçues sont adoptées et si des mesures adéquates sont prises pour une mise en œuvre immédiate.

Depuis quelques années, l’Afrique a poursuivi fermement la politique de réforme et d’assainissement de son environnement économique et œuvre pour le développement des forces productives.

Depuis quelques années, l’Afrique a poursuivi fermement la politique de réforme et d’assainissement de son environnement économique et œuvre pour le développement des forces productives. La situation économique et sociale du continent a ainsi connu d’importantes mutations.

A cet égard, il est important de veiller à ce que les crises récentes ne remettent pas en cause les efforts concrets déployés pour améliorer la qualité de vie des plus pauvres dans nos pays et pour vaincre les fléaux que sont la pauvreté et les maladies. Un appel à plus de solidarité est impérieux, appel auquel répond opportunément l’annonce des relations Turquie-Afrique.

Mesdames et Messieurs,

L’Afrique entend renforcer sa coopération avec la Turquie. Et face aux défis, il est impératif de donner un contenu réel à nos relations en veillant à ce qu’elles reposent non seulement sur le partage des objectifs, mais également sur le partage des moyens et des résultats. C’est à ce titre que chacune des parties prendra la mesure de ses engagements.  

Il convient également d’assurer une étroite collaboration entre les hommes d’affaires des deux parties, d’étendre la voie pour une coopération économique et commerciale accrue dans un esprit de complémentarité afin d’élever nos relations à un niveau de développement mutuellement avantageux.

L’implication de la Turquie dans la stabilisation du continent et dans le règlement des conflits a largement contribué à la conclusion des  accords de transition politique ici et là et démontre, à cet égard, Monsieur le Président, que votre pays est conscient de ce que la stabilité est la condition indispensable au développement économique et à la réduction des inégalités. Ceci constitue une preuve de solidarité fort appréciable.

Au-delà de cette perspective très favorable, nous avons la conviction que les nombreuses potentialités de votre pays  ne manqueront pas d’inciter vos entreprises à investir dans nos pays. Elles y sont d’ores et déjà invitées, et je suis persuadé qu’elles seront encouragées à accentuer leur présence par la politique que vous avez résolument engagée en organisant cette importante rencontre.

Nos échanges avec la Turquie doivent se dérouler dans l’intérêt mutuel des deux parties. Et l’Afrique est davantage intéressée par les investissements turcs dans le cadre de projets de construction de routes, d’hôpitaux, d’écoles et d’autres infrastructures qui manquent désespérément à notre continent.

Mesdames et Messieurs les Ministres

Mesdames et Messieurs,

Les nations veulent vendre leurs biens, mais elles doivent  conserver leur âme. Il est constant aujourd’hui que l’état du monde est particulièrement préoccupant et le continent africain en est une illustration inacceptable eu égard à la pauvreté, à la faim et à l’état de santé précaire de ses populations.

Cette situation doit être un motif de sursaut à l’échelle mondiale pour trouver des solutions à nos problèmes. L’objectif de notre coopération sera de parvenir à un développement commun. Les économies des deux parties peuvent être complémentaires. La Turquie possède des technologies et des expériences de développement, l’Afrique, de son côté, est riche en ressources humaines et naturelles. Il est donc possible aux deux Parties de bénéficier de ces opportunités de coopération.

Nous devons donc encourager nos entreprises à renforcer la coopération réciproque et à se compléter afin de se développer d’une manière qui soit conforme aux exigences d’une économie globalisée.

C’est pourquoi nous appuyons fermement le cadre de coopération Turquie-Afrique et la Déclaration d’Istanbul et sommes optimistes que lors du prochain Sommet, nous constaterons que des résultats positifs auront été déjà enregistrés à travers la mise en œuvre judicieuse des projets et programmes identifiés d’un commun accord par les Parties.

Le Togo, mon pays, est tout disposé à participer et à donner une nouvelle dimension à notre désir commun de promouvoir et d’élargir nos rapports de coopération Turquie-Afrique.

Vive la coopération Turquie-Afrique !

Vive la solidarité entre les peuples !

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