Le groupe France Télécom (FT) s'est renforcé en Afrique, avec la prise de contrôle cette semaine d'opérateurs sénégalais et égyptien, où il dispose d'un vivier toujours plus grand de clients, certes peu dépensiers mais avides de découvrir la téléphonie et internet. Il a conclu jeudi un accord avec l'Etat sénégalais pour lui racheter près de 10% de l'opérateur Sonatel, portant ainsi sa participation de 42,3% à 52,2%.
En début de semaine, France Télécom a avancé un pion en Egypte grâce à une décision de justice lui ayant permis de prendre le contrôle total du premier opérateur mobile du pays, Mobinil.Les 15 pays d'Afrique où l'opérateur a pris pied représentaient en 2008 6% de son chiffre d'affaires, avec près de 3,5 milliards d'euros.
Désormais un client du groupe français sur cinq habite en Afrique, soit 40 millions de personnes, l'objectif étant d'atteindre les 50 millions en 2010.
La présence de France Télécom en Afrique, fruit notamment de l'héritage colonial français, fait écho à celle de l'espagnol Telefonica en Amérique du Sud ou celle du britannique Vodafone dans le Commonwealth (Inde, Australie, Afrique du Sud...).
"Nous sommes présents comme opérateur depuis une vingtaine d'années en Afrique, d'abord en Guinée Equatoriale, et depuis dix ans de façon plus significative avec les vagues de privatisation en Côte d'Ivoire, au Sénégal...", explique Marc Rennard (photo), directeur exécutif de la zone Afrique, Moyen-Orient, Asie.
En 2006 une nouvelle ère a commencé pour France Télécom, à l'affût des licences mobiles accordées par les gouvernements et d'opportunités d'acquisitions d'opérateurs existants, au Niger, au Kenya, en Ouganda... Au Togo, FT espère bien décrocher une licence 3G ; les discussions se poursuivent.
Dans certains pays, Orange, la marque commerciale du groupe, affiche des parts de marché très confortables dans le mobile: 84% au Mali, 63% au Sénégal, 58% à Madagascar et même 100% en Guinée Equatoriale.
L'intérêt pour Orange est d'arriver sur des terres peu défrichées, où le fixe est quasi inexistant, bien loin des marchés occidentaux qui frôlent la saturation en téléphonie mobile.
C'est d'ailleurs un de ses critères pour investir: que le taux de pénétration "ne soit pas excessif".
"Tant qu'on est dans des taux entre 20 et 30%, ça va, si on est au-delà de 60% c'est plus compliqué", confie M. Rennard.
Le potentiel de croissance reste énorme, avec des taux de pénétration de 57% en Egypte, de 40% en Côte d'Ivoire ou seulement 18% à Madagascar. Le marché des télécoms en Afrique et au Moyen-Orient devrait grimper de 10% par an d'ici 2011, selon l'Institut des télécoms et de l'audiovisuel en Europe (Idate).
Une fois sur place, l'opérateur doit s'adapter à un paysage différent, où la quasi-totalité des clients utilisent des cartes prépayées plutôt que des forfaits... avec un budget très limité.
"Les revenus moyens par client sont faibles, de l'ordre du tiers par rapport à l'Europe, donc nous avons des structures de coûts qui sont adaptées de façon à avoir des taux de marge légèrement supérieurs à la moyenne du groupe", explique M. Rennard.
France Télécom réduit ses coûts de production et de maintenance ainsi que ses frais commerciaux, misant sur des vendeurs dans la rue en plus de ses boutiques.
Après avoir fait du mobile son moteur de croissance, l'opérateur amorce un nouveau virage en Afrique, celui d'internet, où l'avenir s'annonce prometteur: il prévoit une croissance annuelle des revenus supérieure à 20% entre 2008 et 2010.