Idées

L’équité vaccinale est un impératif

Mari Elka Pangestu

Les campagnes de vaccination contre le Covid-19 avancent à bon rythme dans certains pays du monde, ce qui leur permettra de sauver des vies et de remettre leur économie sur les rails.

D'autres, en revanche, à savoir la plupart des pays à revenu faible ou intermédiaire, peinent encore à obtenir suffisamment de vaccins ne serait-ce que pour protéger leurs professionnels de santé et de première ligne, ainsi que leurs habitants les plus vulnérables. 

De fait, selon les derniers chiffres disponibles, 66 % de la population dans les pays à revenu élevé a déjà reçu au moins une dose, contre 2 % des habitants dans les pays à faible revenu.

Cette disparité flagrante est en grande partie due à une concurrence mondiale féroce et inégale dans un contexte marqué par une offre limitée de vaccins.

Face à la crise de la COVID, le Groupe de la Banque mondiale a mis sur pied une riposte d’une ampleur et d’une rapidité inédites depuis sa création. Depuis mars 2020, nous avons déployé plus de 150 milliards de dollars pour permettre aux pays de lutter contre les répercussions sanitaires, économiques et sociales de la pandémie.

Dès les 60 premiers jours de cette mobilisation, nous avons entrepris des projets dans 100 pays, dans le but de les aider à répondre aux besoins sanitaires urgents, renforcer la préparation à la menace épidémique, protéger les pauvres et les emplois, et amorcer un redressement soucieux des enjeux climatiques.

En octobre 2020, avant même la mise sur le marché des premiers vaccins contre la COVID, nous avons approuvé une enveloppe de 12 milliards de dollars en vue d’aider les pays à faible revenu à acheter des vaccins et assurer leur déploiement. Sur ce montant, 4,6 milliards ont été alloués à ce jour, en soutien à des campagnes vaccinales dans 55 pays. La moitié d’entre eux font partie des pays les plus pauvres du monde, et plus de la moitié des projets ainsi financés se situent en Afrique. 

Ces financements ne servent pas seulement à se procurer des doses : ils aident aussi les pays à faire en sorte que leur population soit effectivement vaccinée.

En juin dernier, nous avons porté cette enveloppe à 20 milliards de dollars sur 18 mois, afin de continuer à aider les pays à acheter des vaccins, à les administrer et, dans une perspective de plus long terme, à renforcer leurs systèmes de santé.

Dans le même temps, afin de trouver des solutions au manque de vaccins pour les pays en développement, nous misons sur la collaboration avec nos partenaires. Nous nous sommes ainsi associés à Covax, le mécanisme mondial qui vise à fournir à tous les pays un accès équitable aux vaccins, et au Fonds africain pour l’acquisition des vaccins (AVAT), une initiative dirigée par l’Union africaine et le CDC Afrique et soutenue par d’autres partenaires tels que Afreximbank, la Commission économique pour l'Afrique des Nations unies et l’UNICEF. 

Notre objectif : faire en sorte que les pays puissent disposer de nos financements pour se procurer des vaccins via l’ensemble de ces dispositifs.

Certes, les promesses de dons de doses sont montées en puissance dernièrement, laissant augurer une accélération de l’envoi de vaccins vers les pays qui en ont besoin. 

Mais il reste encore beaucoup à faire, et ces annonces doivent encore se concrétiser en actions. 

Nous dirigeons l’équipe spéciale mise en place par les dirigeants du Fonds monétaire international (FMI), du Groupe de la Banque mondiale, de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) afin de suivre, coordonner et faire progresser l'accès aux vaccins, traitements et outils de diagnostic de la COVID.

Ce groupe de travail a créé une nouvelle base de données mondiale et des tableaux de bord nationaux qui permettent de mettre en évidence les besoins et d’appuyer des solutions plus rapides et plus ciblées en vue d’accélérer l’accès à ces ressources dans les pays en développement. 

Les membres de l'équipe spéciale ont également rencontré les dirigeants des principaux laboratoires pharmaceutiques et discuté avec eux des stratégies susceptibles d'améliorer l'accès aux vaccins contre la COVID-19, en particulier dans les pays à revenu faible et intermédiaire inférieur et en Afrique.

La Banque mondiale participe également à l’accélérateur ACT, un dispositif associant les agences mondiales du secteur de la santé et conçu pour assurer aux pays en développement un accès équitable aux outils de lutte contre la COVID ; dans ce cadre, elle codirige l'axe de travail dédié aux systèmes de santé, aux côtés du Fonds mondial et de l’OMS.

Les pays ont non seulement besoin de plus de doses, mais ils doivent également être prêts à en assurer la distribution.

C'est pourquoi près de la moitié des financements sollicités par les pays auprès de la Banque mondiale en matière de vaccination sont destinés au renforcement des systèmes nationaux de distribution des vaccins. 

Il s’agit notamment de produire des données et des systèmes de suivi de meilleure qualité, d’améliorer les chaînes du froid, de former les soignants et de renforcer la confiance des populations dans les systèmes de santé à travers la mobilisation communautaire. 

Un grand nombre de pays - souvent avec l’appui de la Banque mondiale - sont parvenus à renforcer considérablement leurs infrastructures de soins ces dernières années.

Malgré ces progrès, un certain nombre ne disposent pas des capacités nécessaires pour mener à bien ce qui sera probablement l’une des plus grandes campagnes sanitaires de leur histoire.

Selon les dernières données issues de nos évaluations sur l’état de préparation des pays (menées en collaboration avec Gavi, le Fonds mondial, l’UNICEF et l’OMS), près de 95 % des pays ont élaboré des plans nationaux de vaccination et 81 % ont mis en place des mesures de sécurité, mais seuls 64 % ont planifié la formation du grand nombre de vaccinateurs qui devront être mobilisés pour ces interventions. 

En outre, environ la moitié seulement des pays ont mis en place des stratégies d’information auprès de la population destinées à accroître la confiance du public et la demande de vaccins anti-COVID.

L’année écoulée aura été marquée par une prise de conscience croissante de la nécessité d’intensifier la production de vaccins, en particulier au sein ou à proximité des pays actuellement privés de doses.

Cette situation a conduit la Société financière internationale (IFC) à prendre part, en collaboration avec les organismes de financement du développement français, allemand et américain, à un investissement de 600 millions de dollars en faveur de la société sud-africaine Aspen Pharmacare, qui occupe une place de premier plan en Afrique pour la production de traitements et de vaccins contre la COVID.

En outre, la branche du Groupe de la Banque mondiale dédiée au secteur privé intervient aussi dans des pays à revenu faible ou intermédiaire : elle investit dans plusieurs entreprises pharmaceutiques locales commercialement viables afin de leur permettre d’accroître leur production de vaccins dans le cadre d'accords de licence et/ou de fabriquer leurs propres sérums.

L’équité vaccinale est un impératif : c’est non seulement une nécessité morale, mais aussi la seule façon de mettre fin à la pandémie.

C’est pourquoi le Groupe de la Banque mondiale, de concert avec des partenaires clés, déploie des efforts sans précédent pour y parvenir, et le plus vite possible.

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Mari Elka Pangestu

Directrice générale de la Banque mondiale pour les politiques de développement et les partenariats

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