Eco & Finance

L'Afrique demeure l’une des régions les plus dynamiques du monde

Christine Lagarde, directrice générale du FMI

Dans l’immédiat, la priorité de l’Afrique subsaharienne est de gérer les effets de la chute des cours du pétrole, a déclaré Antoinette Sayeh, Directrice du Département Afrique du FMI.

S’exprimant lors d’une conférence de presse à l’occasion des réunions de printemps du FMI et de la Banque mondiale qui se tiennent à Washington, elle a ajouté que le sous-continent devrait rester cette année l’une des régions les plus dynamiques du monde.

Cela dit, bien que les perspectives économiques demeurent favorables, la croissance se situera vraisemblablement cette année en bas de la fourchette de ces dernières années, a précisé Mme Sayeh, en raison surtout de l’impact de la chute des cours du pétrole sur les pays exportateurs de pétrole de la région tels que le Nigéria et l’Angola.

Selon Madame Sayeh, l’Afrique subsaharienne devrait afficher cette année encore des résultats solides, avec un taux de croissance attendu de 4½ % (5,8% pour le Togo), qui placera la région immédiatement après les pays émergents et en développement d’Asie.

«Cependant, l’expansion économique de cette année se situera en bas de la fourchette de ces dernières années. Cela tient surtout à l’impact de la chute des cours du pétrole et des produits de base à laquelle on assiste depuis six mois», a déclaré Mme Sayeh.

Le choc pétrolier aura des effets très hétérogènes sur les diverses économies d’Afrique subsaharienne, a-t-elle ajouté. Les pays exportateurs de pétrole seront durement touchés et, étant donné que leurs marges de manœuvre budgétaires sont généralement limitées, un ajustement budgétaire sensible pèsera sur leurs perspectives de croissance.

À l’inverse, les pays importateurs de pétrole bénéficieront de la baisse des cours, même si cet avantage sera en partie neutralisé par la diminution des cours des produits non pétroliers qu’ils exportent. Mais les investissements d’infrastructure et une consommation vigoureuse soutiendront vraisemblablement la croissance dans ces pays — en particulier dans les pays à faible revenu.

Un autre problème pour la région, d’origine locale cette fois, a été l’épidémie de fièvre Ébola qui a touché la Guinée, le Libéria et la Sierra Leone. L’épidémie reflue lentement, mais elle continue d’avoir de lourdes conséquences économiques et sociales pour ces pays.

En outre, les risques liés aux problèmes de sécurité sont récemment venus sur le devant de la scène, notamment au Sahel et au Kenya. «Au-delà de leur coût humanitaire insupportable pour les sociétés de ces pays, ces troubles, s’ils devaient s’amplifier, poseraient aussi de graves risques budgétaires et décourageraient encore plus les investisseurs nationaux et étrangers», a déclaré Mme Sayeh.

Sur le plan extérieur, les conditions financières mondiales pourraient se durcir du fait de la normalisation de la politique monétaire américaine. Les déficits budgétaires et courants élevés de quelques pays d’Afrique subsaharienne pourraient les rendre vulnérables à une inversion rapide de l’état d’esprit des marchés et à une diminution du financement extérieur.

La reprise inégale de l’économie mondiale pourrait aussi décevoir, notamment en Europe et en Chine, qui sont les principaux partenaires commerciaux de l’Afrique subsaharienne.

À court terme, la priorité de la région sera de faire face au choc pétrolier, a déclaré Mme Sayeh. Dans les pays exportateurs de pétrole, la compression des dépenses doit porter principalement sur les dépenses récurrentes non prioritaires, même si une baisse de l’investissement public est inévitable aussi.

« La baisse des prix du pétrole offre aussi une occasion unique de faire avancer les réformes politiquement difficiles des subventions énergétiques dans l’ensemble de la région », a noté Mme Sayeh.

JAF

Antoinette Sayeh

Au-delà des enjeux immédiats, les perspectives de croissance à long terme restent très favorables pour la région. Toutefois, la baisse actuelle des prix des produits de base rappelle qu’il est nécessaire de diversifier rapidement les économies.

La tendance démographique est favorable : d’ici 2030 environ, le nombre de personnes en âge de travailler en Afrique subsaharienne dépassera celui du reste du monde. « Cela offre à l’Afrique subsaharienne une occasion extraordinaire, qui, si elle est bien exploitée, peut être un solide moteur de croissance à terme », a noté Mme Sayeh.

En réponse à des questions de journalistes, Mme Sayeh a déclaré que les réformes des subventions énergétiques sont politiquement difficiles parce qu’il faut convaincre les consommateurs que les fonds dégagés grâce à la réduction des subventions seront utilisés à bon escient.

« Nous encourageons nos pays membres à communiquer clairement à leur population ce qu’ils ont l’intention de faire avec les gains tirés de la réduction des subventions et à donner des exemples d’utilisation de ces ressources, afin de la convaincre que la réforme vaut la peine », a déclaré Mme Sayeh.

En ce qui concerne l’atténuation de l’impact des pénuries d’électricité en Afrique subsaharienne, Mme Sayeh a noté que ces pénuries touchent à la fois les pays à faible revenu et les pays émergents de la région.

Mme Sayeh a engagé les autorités à faire de la place dans leur budget pour ces dépenses et les autres dépenses de développement essentielles, en accroissant les recettes et en améliorant l’efficience des dépenses.

Mme Sayeh a mentionné aussi l’utilisation des partenariats public-privé pour financer les infrastructures et introduire des innovations du secteur privé qui peuvent améliorer les résultats. Ces partenariats comportent des risques qui devront être bien gérés dans un cadre réglementaire qui tient compte de ces risques et où les pratiques de passation des marchés maximisent les rendements pour le secteur public.

Par ailleurs, les compagnies d’électricité pourraient générer davantage de recettes propres. Mme Sayeh a noté que, dans plusieurs pays du sous-continent, les compagnies d’électricité publiques ne sont pas autorisées à recouvrer leurs coûts à l’aide des tarifs.

Mme Sayeh a indiqué que les réformes des tarifs d’électricité constitueraient un élément important d’un train de réformes du secteur de l’énergie que les pays pourraient opérer pour accroître l’offre d’électricité.

A la question de savoir où se trouve le point critique entre l’augmentation de l’investissement dans les infrastructures et le risque de nuire à la viabilité de la dette, Mme Sayeh a averti que le financement obligataire auquel ont recouru certains pays de la région ces dernières années pourrait devenir plus coûteux à mesure que les États-Unis normalisent leur politique monétaire.

Mme Sayeh a noté que le FMI a révisé sa politique en matière de plafonds d'endettement, en partie étant donné la nécessité pour les pays de dégager une marge supplémentaire pour emprunter afin de financer les infrastructures, tout en préservant la viabilité de la dette des emprunteurs.

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